dimanche 3 décembre 2017

1975 : Caractéristiques des moteurs fonctionnant totalement ou partiellement à l'alcool

MOTEURS THERMIQUES. — Caractéristiques des moteurs fonctionnant totalement ou partiellement à l'alcool. Note de MM. Pierre Eyzat et Jean-Claude Guibet, présentée par M. Edmond A. Brun.

Parmi les types de nouveaux carburants possibles on cite souvent le méthanol ou l'éthanol.

La Note montre que l'utilisation de carburants contenant 10 à 20% d'alcool ne poserait pas de problème technique important. Cependant, ces produits pour être substitués aux carburants classiques nécessiteraient une modification du réglage de la carburation. De nouveaux types de moteurs spécialement conçus pour une alimentation au méthanol ou à l'éthanol purs, présenteraient un certain nombre d'avantages portant à la fois sur le rendement, la puissance spécifique et les émissions de polluants.

1. La teneur en volume d'alcool doit être supérieure à une valeur limite afin que la présence accidentelle de traces d'eau n'entraîne pas de risque de demixtion même à basse température (- 10°C) : cette limite est de 8% pour le méthanol et de 5% pour l'éthanol (fig. 1).

Fig. 1

En outre, pour éviter des troubles de fonctionnement du moteur à chaud provoqués par des tampons de vapeur dans le conduit d'amenée du combustible, il ne faut pas dépasser une certaine teneur volumique en alcool (15% pour le méthanol, 20% pour l'éthanol).

La présence dans le carburant de ce nouveau constituant à haut indice d'octane permettrait, sans modifier la qualité des produits, de réduire la sévérité de fonctionnement de certaines unités de raffinage comme le reforming catalytique, et (ou) d'utiliser des essences à plus faible teneur en alkyles de plomb : par exemple, dans le cas du méthanol on peut n'utiliser que 0,15 g de plomb par litre de carburant au lieu de 0,6.

En ce qui concerne l'adaptation du moteur, l'addition d'alcool dans le carburant tend à diminuer la richesse du mélange carburé admis. Une légère modification du réglage de carburation serait par conséquent nécessaire afin de maintenir le même agrément de conduite et de conserver de bonnes performances en accélération. Ainsi les carburants à base d'alcool et les produits conventionnels ne seraient pas interchangeables sur un véhicule donné à moins d'admettre une augmentation des émissions de polluants-due à l'accroissement de richesse-lors du retour à une alimentation par un carburant sans alcool.

2. La figure 2 montre quelques caractéristiques comparées du méthanol, de l'éthanol et d'un carburant conventionnel. Les propriétés apparaissent très nettement différentes en ce qui concerne à la fois le pouvoir calorifique, la volatilité et la résistance à l'auto-inflammation, caractérisée par l'indice d'octane.

La mise au point d'un moteur spécialement adapté à l'utilisation d'alcool pur concerne essentiellement la préparation du mélange carburé. En effet, les températures d'ébullition à la pression atmosphérique sont, pour le méthanol, 65°C et, pour l'éthanol, 78,5°C :

Fig. 2

à l'une ou l'autre de ces températures, 20 à 40% des constituants d'une essence se trouvent normalement à l'état gazeux. L'obtention d'un mélange carburé aisément inflammable serait tout particulièrement difficile au cours des phases de démarrage à froid. Un moteur spécialement conçu pour l'alimentation en alcool devrait par conséquent être muni d'un circuit d'admission spécial comprenant probablement un système de réchauffage du mélange admis.

L'obtention d'un mélange carburé gazeux exige, dans le cas des deux alcools, un apport de chaleur beaucoup plus important que dans celui d'une essence classique d'abord en raison de leur chaleur de vaporisation plus élevée (263 ou 204 cal/g au lieu de 80 cal/g) et aussi parce que leur concentration dans le mélange stœchiométrique est plus forte : dans un tel mélange, le titre volumique est, en méthanol, de 0,123 et, en éthanol, de 0,065, au lieu de 0,02 pour un carburant conventionnel. On calcule ainsi que, pour assurer une vaporisation complète du combustible, il faut apporter 42,2 cal/1 de mélange gazeux pour le méthanol, 25,1 pour l'éthanol et 6,4 seulement pour un carburant classique. En pratique il serait par conséquent très difficile de vaporiser complètement l'alcool dans la tubulure d'admission. Mais comme on le précisera plus loin, le fait de maintenir une fraction de combustible sous forme liquide présenterait l'avantage de permettre un accroissement de puissance spécifique du moteur.

La très bonne résistance des deux alcools a 1'auto-inflammation (indice d'octane proche de 106) permettrait, sans avoir recours à l'addition d'alkyles de plomb, d'adopter un taux de compression de l'ordre de 11 au lieu de 9,5 avec les carburants classiques.

La figure 3 montre une première estimation des performances que pourrait présenter un moteur spécialement conçu pour l'alimentation en alcool. La vitesse de combustion plus élevée qui caractérise ce type de carburant (48 à 45 cm/s à richesse 1,00 au lieu de 42 cm/s pour le carburant classique) et l'élévation du taux de compression, devraient permettre à richesse égale, un gain de rendement de l'ordre de 3 à 8% par rapport aux moteurs actuels.

Fig. 3

En outre, selon certaines études récentes, on pourrait observer un recul d'environ 0,20 des limites inférieures de richesse permettant un fonctionnement stable. L'utilisation de mélanges pauvres serait par conséquent possible, avec toutes les conséquences bénéfiques que cela implique sur le plan du rendement et des émissions de polluants. Il semble en effet que l'on pourrait obtenir une très faible concentration d'oxyde de carbone et d'autres produits imbrûlés dans les gaz d'échappement. L'emploi de l'alcool devrait également conduire à une réduction des émissions d'oxydes d'azote, car la température des produits de combustion serait nettement inférieure à celle des hydrocarbures contenus dans l'essence (fig. 2).

D'ailleurs une technique permettant de réduire davantage le niveau d'oxydes d'azote deviendrait dans ce cas particulièrement facile à mettre en œuvre : il s'agit de l'introduction d'eau à l'admission, le moteur pouvant être en effet alimenté sans inconvénient avec des mélanges eau-alcool.

On rappellera qu'avec une alimentation en alcool pur, la consommation, en masse, serait augmentée environ d'un facteur 2 en raison de la réduction de pouvoir calorifique.

Pour maintenir la même autonomie du véhicule, il faudrait par conséquent pratiquement doubler la capacité du réservoir.

Sur le plan de la puissance spécifique, l'emploi d'alcool pourrait procurer un gain substantiel dans la mesure où la réalisation du circuit d'alimentation aurait fait l'objet d'une optimisation préalable. Par exemple si 50% seulement du combustible se trouvaient vaporisés au moment de l'admission, aucune perte ne serait consentie, par rapport à un carburant classique, sur le pouvoir calorifique par litre de mélange carburé. D'autre part, la vaporisation — même partielle — entraînerait certainement un refroidissement de la charge et une amélioration du taux de remplissage. La puissance spécifique augmenterait ainsi d'au moins 7% dans le cas de l'éthanol et 10% dans le cas du méthanol (fig. 3).


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